Indemnités de petits déplacements du BTP : indemnité globale forfaitaire prévue dans le contrat de travail, une bonne idée

Parmi les indemnités prévues par les conventions collectives du BTP en cas de petits déplacements, figure la célèbre indemnité de repas, appelée également prime de panier. Un montant dû pour chaque jour passé sur chantier. Mais peut-on s’exonérer du versement de cette indemnité ? Une question qui mérite une analyse juridique approfondie.

Prise en charge des petits déplacements BTP : une indemnité forfaitaire s’imposant à l’employeur

Le régime des petits déplacements impose aux employeurs d’indemniser forfaitairement les frais et les désagréments occasionnés par la nature du poste occupé par l’ouvrier de chantier et son affectation en petits déplacements.

Ainsi, pour chaque jour où un salarié est concerné par l’application du régime des petits déplacements, il doit bénéficier d’une indemnité de trajet. Il peut également prétendre, selon les cas, à une indemnité de repas (ou indemnité de panier) et une indemnité de transport.

Dans une affaire récente, la Cour de cassation a dû se prononcer sur l’application d’une clause contractuelle relative aux prises en charge des frais de déplacement. Le contrat de travail mentionnait la clause suivante :

  • salaire horaire : SMIC 9,295/h ;
  • durée hebdomadaire : 39 heures ;
  • paniers 20 unités
  • et prime de déplacement = 150 euros.

Le débat était le suivant : le salarié peut-il prétendre au bénéfice l’indemnité forfaitaire prévu par le contrat dès lors qu’il a bien été en petits déplacements sur le mois ? Suffit-il qu’il apporte la preuve de la réalisation de déplacements sur des chantiers ?

La réponse donnée par les juges est que le salarié peut en effet prétendre à cette indemnité contractuelle mensuelle à titre d’indemnisation des petits déplacements. La Cour de cassation énonce le principe suivant : « lorsque le contrat de travail prévoit le remboursement forfaitaire des frais professionnels exposés par le salarié, ce dernier peut prétendre à l’indemnisation convenue sans avoir à justifier des frais réellement exposés ».

Avis d’expert :
L’employeur contestait à devoir verser l’indemnité contractuelle entière dès lors que le salarié était affecté certains jours à des chantiers situés à proximité immédiate du siège de l’entreprise. Des chantiers pour lesquels le salarié ne pouvait, selon l’employeur, revendiquer le bénéfice d’une prise en charge de frais supplémentaires par rapport aux salariés sédentaires de l’entreprise. Ce raisonnement, rejeté par la Cour de cassation qui s’est contenté de mettre en avant la force de la clause contractuelle, mérite toutefois d’être approfondi. Nous vous invitons ainsi à parcourir l’article suivant : Paniers dans le BTP : l’incertitude sur les situations permettant de ne pas verser l’indemnité de panier à l’ouvrier en petits déplacements

Prise en charge des petits déplacements BTP : une indemnité forfaitaire à comparer aux minimas conventionnels

L’indemnité forfaitaire contractuelle, par sa rédaction, constitue le montant unique versé au salarié au titre de la compensation des petits déplacements réalisés par le salarié chaque mois.

L’employeur peut-il devoir au final verser une indemnité supérieure au salarié ? Les juges ont fixé ce montant comme un minimum dans l’arrêt du 12 juin 2024. Mais ils n’ont pas évoqué la situation dans laquelle un salarié pourrait réclamer plus que ce minimum contractuel.

En effet, chaque ouvrier du BTP doit bénéficier, pour tout déplacement concerné par l’application du régime conventionnel des petits déplacements, d’un montant d’indemnités quotidiennes minimales. Sauf cas d’une entreprise ayant négocié un accord d’entreprise prévoyant des montants différents pour l’indemnisation des déplacements des salariés par rapport à ceux prévus par la branche.

Dans le cas concerné, le salarié doit se voir attribuer, en principe, selon la convention collective des ouvriers du Bâtiment une indemnité de trajet et une indemnité de panier pour chaque journée, plus une indemnité de transport s’il se rend sur chantier avec son véhicule. L’addition du montant des indemnités de petits déplacements dues au salarié au regard des barèmes locaux négociés par les partenaires sociaux de la branche constitue le minimum à verser au salarié. Il faut le comparer au montant fixe forfaitaire global de 150 euros prévu dans le contrat. Si le minimum calculé selon les barèmes conventionnels est supérieur au 150 euros, l’employeur devrait verser une indemnité différentielle.

Attention

Intégrer dans le bulletin de paie, une indemnité forfaitaire englobant la prise en charge des frais de trajet et des frais de repas et, ou, des frais de transport nécessite donc de vérifier chaque mois que son montant n’est pas inférieur aux minimas conventionnels. Mais un autre problème majeur se pose : comment intégrer cette indemnité globale dans la paie ? Le régime social et fiscal de l’indemnité de trajet est différent de celui des indemnités de transport et de panier. L’ensemble de l’indemnité forfaitaire est susceptible d’être intégrée dans l’assiette des cotisations sociales en cas de redressement URSSAF. Conclusion : prévoir une indemnité forfaitaire globale est une pratique à déconseiller dans les entreprises du BTP, même si elle présente l’avantage d’offrir une visibilité financière au salarié et à l’entreprise.

Cour de cassation, chambre sociale, 12 juin 2024, n° 23-12.409 (lorsque le contrat de travail prévoit le remboursement forfaitaire des frais professionnels exposés par le salarié, ce dernier peut prétendre à l’indemnisation convenue sans avoir à justifier des frais réellement exposés)

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Olivier Castell

Expert en droit du travail et relations sociales, www.didrh.fr

Auteur des documentations SOCIAL BATIMENT, SOCIAL TRAVAUX PUBLICS et RESPONSABLE ET GESTIONNAIRE PAIE BTP pour les Editions Tissot. Formateur en droit du travail auprès des entreprises et des …

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