L’intelligence artificielle (IA) fait son entrée dans les départements juridiques des entreprises, mais son adoption reste encore limitée. C’est ce que conclut, en résumé, la dernière édition de la « Cartographie Legisway des services juridiques 2024 » de l’éditeur de solutions juridiques Legisway. L’étude a été menée auprès de 350 professionnels du droit à travers l’Europe.
Selon cette enquête, 40 % des services juridiques déclareraient utiliser une forme d’IA ou une autre dans leurs activités.
Les principaux domaines d’application sont les tâches administratives (50 % des utilisateurs), l’analyse de documents (50 %) et la production de rapports (36 %). En revanche, cette famille de technologies est encore peu utilisée pour des tâches plus complexes comme la rédaction de contrats sur mesure (9 %) ou la gestion des litiges (19 %).
Encore des obstacles à l’IA dans le juridique
Malgré ses promesses, l’adoption de l’IA reste cependant freinée par plusieurs facteurs. Interrogés, les professionnels du droit qui n’utilisent pas l’IA citent le manque de temps comme la principale raison (39 % d’entre eux) suivi par les contraintes budgétaires (29 %). À noter que pour 36 %, avoir recours à l’IA n’est tout simplement pas une priorité.
Pourtant, pour Margo Trebicka, responsable des ventes chez Wolters Kluwer Legal Software, « ce changement n’est pas seulement audacieux, il est absolument nécessaire ».
L’étude souligne également que les services juridiques qui ont adopté l’IA restent particulièrement sensibles aux questions d’éthique et de fiabilité. Ces préoccupations, combinées à un manque de compréhension du fonctionnement de l’IA (cité par 27 % des répondants), suggèrent un besoin d’éducation et de formation accru dans ce domaine – conclut Legal Software.
L’intégration de l’IA semble par ailleurs être un processus graduel. Les professionnels du droit devront trouver un équilibre entre l’exploitation des avantages de cette technologie et la gestion des défis qu’elle présente en matière d’éthique, de fiabilité et de ressources, avertit l’éditeur.
Cette étude a été réalisée par Legisway, la filiale de Wolters Kluwer – le groupe hollandais, également maison mère en France de l’éditeur spécialisé dans la gestion financière CCH Tagetik. Spécialiste des solutions des outils logiciels pour optimiser les opérations juridiques, Legisway a ajouté cette année de l’IA à sa « contrathèque ».
L’IA dans le droit, une application sensible
L’application de l’intelligence artificielle en générale et de l’IA générative, surtout, soulève des enjeux particuliers, inhérents à la nature sensible et confidentielle des informations traitées dans le domaine juridique.
Les services juridiques se doivent de protéger des données souvent critiques pour leurs clients ou leur organisation. L’utilisation de l’IA doit donc suivre des règles strictes qui ne sont pas sans rappeler, dans un tout autre domaine, les principes de « l’IA de confiance » pour les applications critiques industrielles.
La confidentialité, la protection contre l’espionnage industriel (et donc l’immunité à l’extraterritorialité de droits non européens), ainsi que l’auditabilité et l’explicabilité des décisions prises par les algorithmes sont des impératifs non négociables pour les juristes – tout comme pour les industriels.
Ces problématiques sensibles expliquent d’ailleurs certainement en grande partie la progression graduelle de l’IA dans ce secteur du droit.
Parmi les solutions possibles, le chiffrement de bout en bout (avec, quand c’est possible, la gestion des clefs assurée par le client lui-même) pour protéger la confidentialité des données traitées par l’IA, l’anonymisation ou la pseudonymisation des données, ou encore le déploiement d’un algorithme entièrement sur site, sont des pistes sérieuses que les éditeurs explorent actuellement.
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