Début 2024, l’éditeur juridique Lefebvre Dalloz lançait GenIA-L : un outil d’intelligence artificielle dit « conversationnel » destiné aux professionnels du droit. Cette IA répond à des questions juridiques posées en langage naturel, et peut également proposer des synthèses, des références, des tableaux récapitulatifs ou même des arguments juridiques. « Avocats, experts clients, DAF [directeur administratif et financier, NDLR], professionnels de la RGPD… Nous nous adressons à tous les utilisateurs et les professionnels du droit, explique Caroline Sordet, directrice générale des maisons d’édition de Lefebvre Dalloz. L’IA nous permet de générer des réponses immédiates et intelligibles, y compris pour les non-juristes. »
Loin de remplacer les professionnels de l’édition juridique, l’intelligence artificielle est vue comme une opportunité pour le groupe européen, qui s’approprie le sujet depuis plusieurs années. Ainsi, par exemple, dès 2019, l’éditeur avait construit un partenariat avec la Cour de cassation sur le sujet. En 2021, un accélérateur de start-up, où l’IA revêt une place importante, a été lancé. Finalement, au lancement de ChatGPT, Lefebvre Dalloz a ouvert un environnement sécurisé permettant à chaque collaborateur de s’emparer de cet outil, sans risquer la fuite de données.
Renforcer la culture tech
Cette mise à disposition de ChatGPT a accéléré l’engouement des salariés de Lefebvre Dalloz pour l’IA, d’autant plus que le groupe mise sur eux pour assurer sa transition numérique. « Le développement d’outils IA peut générer des préoccupations, remarque la directrice générale. Mais nos collaborateurs se sentent solides pour aborder ce type de sujet, et sont moteurs, car ils voient cette technologie comme une aide. » Afin de renforcer encore un peu plus cette « culture tech », Lefebvre Dalloz a rendu la formation IA obligatoire pour toutes les équipes éditoriales : d’abord théorique, sur ce que l’intelligence artificielle peut et ne peut pas faire, cette formation devient ensuite pratique, sur la manière d’interroger une IA conversationnelle.
Chaque collaborateur est de plus invité à réfléchir à la manière dont l’IA pourrait faciliter son travail au quotidien. Au total, une quarantaine de cas d’usage ont été imaginés : « Par exemple, certaines lois embarquent de nombreuses thématiques différentes, et l’IA permet de guider les rédacteurs pour mettre à jour le fonds documentaire », fait valoir Caroline Sordet. L’intelligence artificielle permet également de faire des liens entre les articles, d’adapter des textes à différentes professions, ou encore de mieux gérer le flux de nouveaux contenus juridiques.
Impliquer les rédacteurs
Passé l’idée, les équipes rédactionnelles, soit quelque 400 collaborateurs sur les 1.200 que compte le groupe en France, sont directement mises à contribution pour développer ces solutions d’intelligences artificielles, aux côtés des équipes R&D. Par exemple, GenIA-L a été testé par les rédacteurs avant son déploiement, notamment pour travailler sur ses prompts. De plus, les solutions développées par Lefebvre Dalloz ne s’appuient que sur ses propres bases de données, systématiquement remises à jour par les équipes rédactionnelles. « L’IA ne travaille que sur l’information que l’on lui fournit car les données entrées sont complexes et interprétatives, explique Michael Benesty, directeur R&D pour le groupe. L’humain reste celui qui commente et interprète la loi, c’est une nécessité. »
Alors que GenIA-L rencontre un « succès commercial », selon le groupe, ce dernier est déjà bien lancé dans sa transition technologique : sur les 540 millions d’euros de chiffre d’affaires réalisés en Europe, 50 % viennent du digital. En focalisant sur la France, le chiffre atteint 80 %.
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