Maturité RSE/ESG : peut mieux faire.
Les constats du Baromètre ESG-RSE et Directions Juridiques 2024 sont sans appel : le sujet n’a pas encore été appréhendé à sa juste mesure, indépendamment du chiffre d’affaires de l’entreprise.
En effet :
- les juristes considèrent que leur entreprise a une faible maturité sur le sujet ESG-RSE : niveau de maturité moyenne (entreprise) = 5,5/10 ;
- le niveau de maturité des directions juridiques est très hétérogène, mais globalement très faible : niveau de maturité moyenne (DJ) = 4,96/10.
ESG/RSE : conformité vs stratégie ?
Selon les résultats de l’enquête menée auprès des juristes, le sujet ESG-RSE est d’abord cité comme un sujet de conformité, avant d’être considéré comme un enjeu réputationnel, puis business et enfin comme un enjeu stratégique.
C’est particulièrement vrai pour les plus petites entreprises (moins de 100 millions d’€ de chiffre d’affaires) ; à partir de 100 Millions d’€, les entreprises l’envisagent davantage comme un enjeu stratégique et business.
Or, comme le soulignent Sylvain Lambert, Associé Développement durable, PwC France et Maghreb et Fabien Radisic, Associé, ESG Leader, PwC Société d’Avocats, « adresser [la CSRD] avec une vision de compliance et de reporting est l’erreur à ne pas faire. Bien sûr il faut être conforme, bien sûr il faudra produire un reporting, mais c’est un texte qui traite de stratégie et de performance avant tout ».
Pilotage des politiques RSE/ESG : une opportunité pour les équipes juridiques.
Quel que soit le sujet ESG-RSE, il n’y a pas d’organisation « type » pour le piloter. Le baromètre met néanmoins en lumière 2 points saillants sur les directions métiers :
- seulement 1/3 des entreprises interrogées ont une direction RSE autonome pour piloter le sujet ESG-RSE. Cela étant, plus l’entreprise est grande, plus ces directions existent : 63% des entreprises de plus de 6 milliards d’€ de CA ont une direction ESG-RSE.
- l’autre grande tendance : un co-pilotage entre plusieurs fonctions (29%).
Au-delà de ces constats, deux idées-clés :
- les entreprises qui valorisent le plus le rôle potentiellement stratégique de la direction juridique sur l’ESG-RSE sont celles qui sont les plus matures en termes d’ESG-RSE ;
- il y a donc une « opportunité à saisir pour le Juridique de s’affirmer comme un acteur clef de la démarche ESG-RSE de son entreprise ».
Désalignement entre la priorité ESG de l’entreprise et le niveau d’implication des juristes.
Il ressort de l’enquête que le sujet ESG est d’abord traité sous l’angle « E » (Environnement). Et, ce, quelle que soit la direction pilote de l’ESG-RSE et quel que soit le CA de l’entreprise.
Néanmoins, le secteur d’activités a un impact sur cette focalisation : la focale est placée sur le S (Social) pour les secteurs du BTP-Construction, des Médias-Édition-Communication, et la Pharma.-Santé.
Autre leçon du baromètre : si l’entreprise tend vers le « E », le Juridique, lui, tend vers le « G » (gouvernance).
Comme l’explique l’étude, il n’y a rien de très surprenant à ce que les directions juridiques déclarent être principalement impliquées sur les sujets de gouvernance, en raison de l’assimilation assez systématique et culturelle de l’aspect Gouvernance au Réglementaire et au Corporate, donc au Juridique.
Parallèlement, la moindre implication du Juridique sur les sujets Environnement s’expliquerait par l’absence de compétences spécifiques au sein des directions juridiques. Une difficulté renforcée par le fait que le sujet est « éclaté » entre différentes directions.
Tout ceci n’aiderait ainsi pas la DJ « à matérialiser et structurer le périmètre de ses missions et négocier des ressources pour développer ces compétences en interne ».
Autre enseignement, assez surprenant : malgré le désalignement sur les priorités ESG, 91% des directions juridiques considèrent que la répartition E, S, G de l’entreprise est appropriée ! 38% pensent même que cette répartition n’évoluera pas.
L’étude en conclut que « si l’entreprise garde les mêmes priorités, alors ce sera à la Direction Juridique d’évoluer pour devenir un partenaire crédible sur les priorités de l’entreprise ».
Une nouvelle occasion de souligner le rôle moteur que peuvent endosser les DJ dans la conduite des activités des opérateurs économiques.
Sortir de la « confort-mité ».
Un dépit du constat précédent, sur la place stratégique du Juridique, l’analyse de l’enquête met en évidence le fait que la fonction juridique ne se considère pas (encore) comme un acteur clef sur les sujets ESG-RSE.
Elle reste dans sa zone d’expertise. D’ailleurs, sur le court terme, la majorité des juristes interrogés ne voit pas d’évolution du périmètre de leur direction avec les sujets ESG-RSE, sauf dans les entreprises de plus de 10 milliards d’€ (7,1/10).
Pour se réaligner avec l’entreprise, le Juridique va donc devoir démontrer sa capacité à développer, en matière d’Environnement, une vision plus large que celle de la seule conformité juridique. Et l’étude d’en conclure que les juristes vont devoir sortir de leur zone de confort, pour aller vers le « E » et le « S ».
Développement des compétences : les besoins opérationnels avant tout.
Le désalignement des priorités précédemment évoqué n’implique pas l’immobilisme.
Plusieurs éléments sont identifiés comme vecteurs de l’évolution du périmètre d’intervention de la DJ :
- la CSRD ;
- la nécessité d’assurer la conformité réglementaire RSE ;
- le conseil juridique afférent, au vu de l’intensification de la réglementation, notamment européenne.
Les juristes priorisent le renforcement de leurs compétences juridiques et réglementaires, en développant la veille juridique et prospective. Une perspective qui semble, en effet, comme le mentionne le baromètre, « logique et légitime dans le contexte d’inflation normative ».
Nécessité faisant loi, avec les impératifs de production quotidienne, la priorité est naturellement donnée à la maîtrise de la « matière première » qu’il est question de mettre en œuvre.
Les juristes sont aussi bien conscients qu’il va aussi être nécessaire de :
- renforcer leur maîtrise des outils d’évaluation de la conformité RSE ;
- développer leur capacité à intégrer les enjeux ESG-RSE dans les contrats, les transactions, les contentieux, les audits et les due diligences et plus globalement l’activité de l’entreprise.
Notons à la suite de l’étude, que la compétence « transverse », non-juridique, de maîtrise des outils et des méthodes d’évaluation, de reporting et de communication sur les impacts ESG-RSE de l’entreprise n’apparait qu’en 4e position des priorités.
Or, selon l’étude, ces compétences transverses et soft sont précisément celles permettant de crédibiliser la direction juridique sur les sujets ESG-RSE.
Il est vrai que l’appréhension des différents aspects de l’ESG-RSE requiert une approche systémique et une compréhension globale des interactions complexes et interdépendantes. À l’instar d’autres secteurs juridiques hybrides, le droit de l’environnement par exemple met en jeu des compétences non seulement juridiques, mais aussi scientifiques-sciences « dures » et techniques.
Les marges de progression sont ainsi multiples, pour un chantier au long cours. On y verra évidemment une large ouverture dans les options de formation des juristes d’entreprises et une opportunité de diversification des profils et, avec des marges de progression aussi larges que diversifiées, pour un chantier au long cours.
Gagner en maturité RSE/ESG : comment passer à l’action ?
L’étude le rappelle d’emblée [3], les politiques RSE/ESG ont des impacts certains pour les équipes juridiques :
- positionnement de la fonction juridique (sa valeur ajoutée et sa contribution au développement de l’entreprise, son positionnement vis-à-vis des autres directions impliquées sur le traitement des sujets ESG-RSE) ;
- relation des juristes d’entreprise avec leurs clients et parties prenantes internes ;
- capital humain de la fonction juridique (les compétences, les profils, la formation…) ;
- gestion des savoirs et de l’innovation (la veille, les outils spécifiques), l’organisation (notamment la relation avec les conseils externes, l’effet de levier).
Au vu de ces enjeux, se pose alors, comme souvent, la question de savoir comment faire. Sans surprise, il n’y a pas de formule magique pour construire sa feuille de route. Et, ce d’autant que les variantes à prendre en considération sont multiples. L’une d’entre elles concerne l’objet même du baromètre : la maturité de l’entité et celle de son équipe juridique.
Si les juristes se positionnent globalement au même niveau de maturité que le reste de l’entreprise (voir supra), 4 grands profils de fonctions juridiques ont pu être identifiés :
- profil 1 : entreprise non mature sur ESG-RSE & DJ non mature sur ESG-RSE
- profil 2 : entreprise mature sur ESG-RSE & DJ mature sur ESG-RSE
- profil 3 : entreprise mature sur ESG-RSE & DJ non mature sur ESG-RSE
- profil 4 : entreprise non mature sur ESG-RSE & DJ mature sur ESG-RSE
Partant, le baromètre PwC-AFJE explore différents leviers d’intégration des sujets ESG-RSE, avec 4 plans d’action. Pour chacun des profils, des préconisations sont partagées sur les aspects suivants :
- compétences et formation ;
- gestion des risques et conformité ;
- gouvernance et stratégie ;
- intégration et collaboration ;
- ressources et outils.
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