L’intelligence artificielle est-elle responsable juridiquement

L'intelligence artificielle est elle responsable juridiquement

Les systèmes d’intelligence artificielle (IA) se développent à vive allure, mais aucun régime juridique spécifique de responsabilité ne leur est applicable. L’IA peut entraîner plusieurs types de dommages : discrimination, mésinformation, violation de la vie privée ou de la propriété intellectuelle, accidents, contenus illicites, malveillance et cyberterrorisme…

Pour engager la responsabilité du concepteur de l’IA, la victime devra prouver l’existence d’un acte préjudiciable ou d’une omission de sa part, qui a causé le dommage.

Dans sa résolution du 3 mai 2022 sur l’IA, le Parlement européen pointait les difficultés soulevées : « Les règles nationales existant en matière de responsabilité, notamment en ce qui concerne la responsabilité pour faute, ne sont pas adaptées pour traiter les actions en responsabilité dans le cas de dommages causés par des produits et services dotés d’IA. » Compte tenu des caractéristiques spécifiques de l’IA (complexité, autonomie et opacité), il peut être difficile ou très coûteux pour les victimes d’identifier la personne responsable et d’apporter la preuve du préjudice.

Un arsenal européen

Le 28 septembre 2022, la Commission européenne publiait deux propositions de directives destinées à revoir et à moderniser les règles applicables à l’IA en matière de responsabilité. La première a révisé les règles de responsabilité des produits défectueux de 1985 afin d’y inclure l’IA. La seconde proposait de créer une responsabilité civile extracontractuelle de l’IA. L’IA Act, adoptée ce 21 mai, est la première réglementation européenne encadrant l’IA.

 

Face à ce constat, le législateur européen a proposé de revoir la directive sur la responsabilité du fait des produits défectueux de 1985 afin d’intégrer l’IA dans la liste de ces produits. « La victime doit rapporter la preuve que l’IA a été défectueuse et qu’elle lui a causé un acte préjudiciable. Mais l’IA n’est pas forcément défectueuse lorsqu’elle crée un dommage…», explique Gérard Haas, avocat fondateur du cabinet Haas Avocats, spécialisé dans le droit des nouvelles technologies et de la protection des données.

L’IA Act, tout récemment adopté, va plus loin, avec une approche axée sur les risques et en imposant des règles de transparence et de fiabilité aux entreprises ayant recours à l’IA. Ces obligations présentent un niveau d’exigence plus ou moins contraignant selon le niveau de risque identifié. « Le législateur est parti du principe que le fait même d’utiliser une IA est risqué. Le texte met à la charge des entreprises ayant recours à l’IA une obligation de transparence, ce qui allège la charge de la preuve pour les potentielles victimes de dommages : il n’y a pas de condition de défectuosité », distingue Gérard Haas. La responsabilité de la personne qui entraîne et utilise l’IA pourra être recherchée dans la manière dont elle met en place les prompts (1).

Encore peu de litiges

Pour l’heure, les procès en responsabilité contre l’IA sont encore rares. « Les seuls litiges sur l’IA que l’on connaît pour l’instant portent principalement sur la violation des droits d’auteur par l’IA. Ce qui revient à traiter le problème de la constitution des données, du côté du responsable de l’IA. Des décisions ont été rendues par des tribunaux américains, mais elles divergent », précise l’avocat.

La proposition de créer une responsabilité spécifique à l’IA est quant à elle restée en suspens. « L’idée de doter l’IA d’une personnalité juridique reçoit de nombreuses critiques. Lui reconnaître ce droit reviendrait à la mettre sur un pied d’égalité avec l’humain.» Si l’IA a un jour une personnalité juridique, encore faudrait-il la doter d’un patrimoine et de garanties. « Beaucoup d’acteurs y sont d’ailleurs opposés. Pour eux, l’IA est et doit rester une machine.»

1. Instructions de recherche données par l’utilisateur à une intelligence artificielle pour obtenir un résultat.

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