Coluche aurait 80 ans aujourd’hui : ses enfants ont bataillé plus de 30 ans pour récupérer leur héritage

Coluche aurait 80 ans aujourd'hui : ses enfants ont bataillé plus de 30 ans pour récupérer leur héritage
Par Lucie Gosselin | Rédactrice

Journaliste passionnée, depuis plus de 10 ans, je réalise des enquêtes, des portraits, des reportages ou des interviews.

Le 19 juin 1986, le clown préféré des Français trouvait la mort dans un accident de moto. Durant les décennies suivantes, ses deux fils, Romain et Marius Colucci, ont mené un long bras de fer juridique, notamment contre l’ex-producteur de Coluche. Ils auraient touché plus d’un million d’euros pour des droits non-perçus sur des enregistrements de leur père.

Coluche aurait 80 ans aujourd’hui : ses enfants ont bataillé plus de 30 ans pour récupérer leur héritage !

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Putain de camion. C’est le titre d’une superbe chanson de Renaud sortie en 1988 sur l’album du même nom. C’est aussi le sentiment qu’ont partagé des millions de Français quand, le 19 juin 1986 à Opio (Alpes-Maritimes), Michel Colucci, dit Coluche, a fracassé sa puissante moto contre un camion lui coupant soudainement la route dans un virage.

Né le 28 octobre 1944 dans le XIVe arrondissement de Paris, l’humoriste et acteur aurait eu 80 ans aujourd’hui. Issu d’un milieu ouvrier, il avait coutume de dire « Je ne suis pas un nouveau riche, je suis un ancien pauvre » quand on l’interrogeait sur sa fortune. Généreux, il faisait profiter de son argent sa famille, ses amis et pas mal de parasites invités dans sa maison parisienne de la rue Gazan ou celle de Deshaies, en Guadeloupe. Il donnera également 1,5 million de francs (365 000 euros) à l’abbé Pierre pour son mouvement Emmaüs. D’ailleurs, sa célèbre salopette bleue et blanche venait de ce dernier.

Mais Coluche était un piètre gestionnaire et, à sa mort, il laissa de grosses dettes fiscales. Dans un entretien, accordé au journal Le Monde, en août 1984, il s’en expliquait. « L’argent, on n’en a jamais assez. Je suis célibataire, officiellement sans charges, et je paie 78 % d’impôts. Sur 1 milliard (de centimes), il reste 200 briques. Ce n’est pas rien, d’accord, mais tout le monde ne les gagne pas, et on ne peut pas s’arrêter parce qu’on est en dettes. Les 78 %, on les paie l’année d’après, et si pendant ce temps j’écris et je me fais 150 briques, je n’ai même pas de quoi commencer à payer mes impôts précédents. »

L’ex-femme de Coluche avait cédé des droits

Après sa mort, ses enfants, Romain et Marius Colucci, ont donc refusé sa succession, pour ne pas avoir à éponger ces dettes. Au début des années 1990, ils se sont ravisés et ont accepté l’héritage. Ils se sont alors retrouvés en conflit ouvert avec Paul Lederman, le producteur historique de leur géniteur. En 1998, ils l’assignent en justice au sujet des redevances de droits d’auteur attachés à l’exploitation des enregistrements phonographiques de Coluche.

De son vivant, et depuis son décès, le comique aurait vendu plus de cinq millions de disques vinyle et CD reprenant ses cinq spectacles en solo. En 1988, Véronique Kantor, son épouse de 1975 à 1981 et la mère de ses fils, avait cédé les droits sur ses enregistrements à Paul Lederman, moyennant une contrepartie financière.

La plainte des enfants concerne les redevances dues sur les enregistrements de 31 sketchs réalisés avant et après le divorce de Coluche et de leur mère. Le contentieux se cristallise notamment autour du disque, Enregistrement public volume 2, enregistré selon eux avant le mariage de leur mère avec Coluche.

Après des années de négociations, de non-lieux et de reports, Romain et Marius obtiennent gain de cause. En février 2010, leur adversaire est condamné par un tribunal de grande instance de Paris à leur verser 1,1 million d’euros. Ils réclamaient près de 2,5 millions d’euros. M. Lederman fait appel de cette décision. Parallèlement à cette procédure civile, une information est ouverte après une plainte des Colucci contre Lederman pour « faux et usage » et « tentative d’escroquerie au jugement« .

« Les éditions Paul Lederman n’ont pas tenu leurs engagements contractuels »

En 2017, La Cour d’appel de Paris confirme le jugement de première instance et condamne le producteur à verser 400 000 euros d’arriérés de redevances pour une série de 12 sketches (dont C’est l’histoire d’un mec sur le pont de l’Alma, Le CRS arabe et Gugusse). « Cet arrêt confirme que les éditions Paul Lederman n’ont pas tenu leurs engagements contractuels pendant trente ans », précise alors l’avocate des plaignants.

Enfin, en 2019, la Cour d’Appel de Versailles prononce un nouveau verdict en faveur des enfants. Les droits de neuf autres spectacles de Coluche doivent revenir à ses deux héritiers et M. Lederman doit verser aux héritiers 40 000 euros de provisions dans l’attente des décomptes d’exploitations des enregistrements.

Aujourd’hui, Marius et Romain ont respectivement 48 et 52 ans. Le premier mène une carrière de comédien remarquée, notamment dans la série Les petits meurtres d’Agatha Christie, sur France 2, de 2009 à 2012. Son cadet, plus discret, n’a pas fait carrière dans le spectacle mais est administrateur des Restaurants du coeur, l’autre grand héritage de Coluche. En 2016, dans les colonnes du Figaro, il déclarait : « Je défends la mémoire de mon père et son héritage, ça me suffit. »

Leur maman, Véronique, est décédée en 2018. Paul Lederman est, lui, parti le 21 juillet dernier à l’âge de 84 ans. Loin de tout ce tumulte, le 19 juin de chaque année, des dizaines de motards et amoureux de Coluche viennent se recueillir devant la stèle commémorative dressée à Opio près du lieu de l’accident. Pour maudire le « putain de camion », à l’origine de tout ce tumulte.

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