Assurances des collectivités : les recommandations des sénateurs pour faire face aux difficultés

Assurances des collectivités : les recommandations des sénateurs pour faire face aux difficultés

Lancée le 30 janvier 2024, la mission d’information sénatoriale consacrée aux problèmes assurantiels des collectivités remettait jeudi 28 mars son rapport. « Cette mission nous a permis de confirmer l’ampleur des difficultés auxquelles font face les collectivités », estime son rapporteur, Jean-François Husson (Les Républicains – Meurthe-et-Moselle). Elles sont de trois natures. Soit l’assureur augmente de façon substantielle les montants de franchise ou de cotisation. A l’instar de la ville d’Arcueil (Val-de-Marne) qui a reçu l’été dernier un avenant faisant passer la franchise en cas d’émeutes de 1500 euros à 2 millions d’euros. Soit l’assureur résilie unilatéralement le contrat. Enfin, certaines collectivités ne parviennent plus à s’assurer : 24% des collectivités ayant répondu à la consultation (714 au total) ouverte dans le cadre de la mission d’information ont, depuis le 1er janvier 2023, lancé un appel d’offres qui s’est avéré infructueux.

À LIRE AUSSI



Emeutes : les contrats d’assurance des collectivités territoriales vont aussi souffrir


Saisine de l’Autorité de la concurrence

Des difficultés qui s’expliquent, selon la mission d’information, par le manque de concurrence. La commission des finances du Sénat a saisi l’Autorité de la concurrence afin qu’elle propose des modalités pour rétablir davantage de concurrence sur le marché de l’assurance de la collectivité. Celui-ci est principalement entre les mains de deux acteurs : Groupama et la Smacl. Cette dernière ayant pratiqué une « politique tarifaire très agressive » au cours des dix dernières années, note le rapport d’information. Ainsi, alors que la sinistralité augmentait, les montants des primes ont fortement baissé entre 2017 et 2023, à rebours de ce qui est observé pour les assurances des entreprises. « La situation actuelle trouve sa source uniquement dans le comportement des assureurs, observe Jean-François Husson. La hausse de la sinistralité, illustrée par les émeutes ou par les événements climatiques, n’est qu’un révélateur ». D’ailleurs, toutes les collectivités, même celles non affectées par ces phénomènes, font face à des difficultés d’assurance.

Optimiser la passation des marchés publics

Dans l’attente d’un changement profond du secteur, les collectivités sont invitées à revoir certaines de leurs pratiques, notamment en matière de commande publique, pour attirer davantage de candidats. Les marchés d’assurance, qui obéissent au régime de droit commun des marchés publics depuis 1998, font l’objet dans 75 % des cas d’un appel d’offres, procédure jugée trop rigide et peu adaptée aux spécificités du secteur. La Direction des affaires juridiques (DAJ) de Bercy, auditionnée par les sénateurs, estime pourtant que, même au-dessus du seuil de procédure formalisée, ces marchés pourraient faire l’objet d’une procédure négociée. Leur complexité notamment justifierait de recourir à la procédure avec négociation (art. R. 2124-3 du Code de la commande publique).

La crainte du contentieux et le manque d’information expliqueraient la frilosité des collectivités. La mission sénatoriale recommande dès lors à la DAJ de promouvoir l’ensemble des outils offerts aux acheteurs publics pour la passation de leurs marchés d’assurance. Sont cités : le sourcing, la formulation du besoin en des termes suffisamment ouverts, la possibilité de répondre aux demandes de renseignements complémentaires des candidats ou de demander de préciser ou compléter la teneur de leur offre. En parallèle de son rapport, la mission sénatoriale publie un guide à destination des collectivités territoriales pour la passation des marchés d’assurance.

Connaissance et maîtrise du risque

Le dialogue entre assurés et assureurs apparaît donc primordial aux yeux des rédacteurs du rapport d’information. Il doit permettre de garantir une bonne connaissance du risque. Chiffre qui étonne : 30% des collectivités ayant répondu à la consultation précitée déclarent ne pas avoir d’inventaire précis de leur patrimoine. Les sénateurs soulignent la nécessité de progresser sur ce point, condition pour adapter au mieux son marché public. Il est aussi conseillé de permettre aux assureurs candidats de procéder à une visite préalable à la remise de leur offre. 

Face au coût croissant des assurances qui s’annonce, la mission d’information met aussi l’accent sur l’importance de mieux maîtriser le risque. Une systématisation des franchises pourrait être un début de réponse, la collectivité étant davantage responsabilisée. Une telle pratique permettrait également de procéder à un allotissement des marchés, par nature et montant de risque. 

Un préavis de résiliation à allonger

Seule modification législative souhaitée par les sénateurs : une extension du délai de préavis en cas de résiliation par l’assureur. Il est actuellement de deux mois, conformément à l’article L. 113-12 du Code des assurances, applicable aux marchés publics d’assurance. La mission d’information recommande de le porter à six mois pour le rendre plus compatible avec le lancement d’une nouvelle procédure d’attribution par la collectivité. A noter qu’une décision du Conseil d’Etat de juillet 2023 (CE, 12 juillet 2023, n°469319, mentionnée au recueil Lebon) est venue offrir un début de réponse à cette difficulté : il a jugé que la personne publique peut imposer à l’assureur de poursuivre l’exécution du contrat pendant la durée strictement nécessaire au déroulement de la procédure de passation du nouveau marché, sans que cette durée ne puisse excéder douze mois.

À LIRE AUSSI



Emeutes : « Les maîtres d’ouvrage et les entreprises de la construction peuvent s’attendre à des coûts plus importants pour souscrire une assurance », Ivan Bourasseau et Catherine Jachet, Verspieren


Sélectionné pour vous

CEE, VNF... Vos textes officiels du vendredi 29 mars 2024

La raison d’être de editionsefe.fr est de trouver en ligne des communiqués autour de Edition Juridique et les présenter en s’assurant de répondre au mieux aux interrogations des gens. Le site editionsefe.fr vous propose de lire cet article autour du sujet « Edition Juridique ». Cette chronique se veut reproduite du mieux possible. Vous avez la possibilité d’envoyer un message aux coordonnées fournies sur le site dans le but d’indiquer des explications sur ce texte sur le thème « Edition Juridique ». Dans peu de temps, nous publierons d’autres informations pertinentes autour du sujet « Edition Juridique ». Cela dit, visitez régulièrement notre site.